FÊTONS LES MOTS DE L’ENFANCE !
Texte des auteur/trice/s pour le 1er juin 2019
Co-écrit par Caroline Stella, Sabine Tamisier et Catherine Verlaguet et Dominique Richard, en complicité avec toutes celles et ceux qui écrivent pour la jeunesse, ce texte est destiné à être lu en ouverture de chaque 1erjuin.
Dans la rue, il y a Bilfou qui s'imagine être dans la savane et rêve de girafes et de crocodiles…
Devant le miroir, il y a Victor qui met la robe de maman pour laisser place à Victorine...
Sur la plage bondée, il y a Soraya, assise seule sur sa serviette rouge. Elle regarde les ados en maillots qui chahutent, se bousculent et s’enlacent, tandis que frappe le soleil brûlant sur son bel habit noir, qui couvre tout l’espace de son corps, en pleine effervescence…
Dans sa chambre, il y a Jérôme qui écoute la chanson que fait la pluie sur la vitre de sa fenêtre, et qui réalise soudain que le soleil, lui, quand il brille, est muet...
Dans la cour, il y a le petit Kevin qui s’agrippe à la jupe de la maîtresse en suçant son pouce…
Sous la tente, il y a Saharou blotti contre Massa qui attend le sommeil et les rêves qui l’emmènent dans son pays natal…
Dans les blés, il y a Tonin et son chien essoufflé, qui jouent à saute-épis et tombent et roulent, se relèvent, au milieu des vestiges des derniers coquelicots…
Dans la cuisine, il y a Béchir qui fait des gâteaux comme d’autres peignent ou écrivent des poèmes...
Dans la lune, il y a Jimmy qui se dit qu'il ne devrait pas y être si souvent…
Sur le chemin, il y a Martin qui muni de son seau part pêcher les déchets qu’on laisse sur les plages…
Sous la table, il y a Carmela qui frissonne et sanglote et refuse de manger les cuisses de ce beau lapin blanc, tué par son papa en ce début d’automne…
Dans un coin, il y a Estéban qui écrit des histoires en secret, avec des personnages qui ont la peau verte, s’envolent, et surtout disent et vivent tout ce qu’il voudrait...
Dans la cuisine, il y a Hélène qui fait ses devoirs comme tous les soirs, en attendant le retour de sa mère…
Dans sa chambre, il y a Athena qui sèche les cours depuis trois jours par peur des coups et quolibets de ses copains de classe…
Sur la plus haute branche de l’arbre centenaire, il y a Salomé. Elle scrute l’horizon dévasté de sa ville toute en ruines et se jure qu’un jour, elle construira des maisons bien plus fortes que les vents, les bombes et les mers, la lave des volcans et les tremblements de terre…
Dans la rue, sur une couverture trop fine, il y a Camélia assise, main tendue, qui pour ne pas avoir froid imagine la plage qu’il y a, soit disant, sous les pavés...
Sous les étoiles, il y a Sabrina allongée dans l'herbe mouillée qui s'imagine devenue grande…
À la barre, il y a Momo qui travaille ses pointes de souris pour devenir petit rat de l’opéra…
Dans la vieille cuisine où la pendule tictaque, il y a Lily et son papi Léon qui jouent au mistigri dans la douce pénombre de l’heure d’après-goûter. Et ils rient…
Sur la très vielle photo de classe, il y a Alfonso qui regarde l’arbre au lieu de l’objectif parce qu’on lui a dit que le petit oiseau allait sortir...
Dans les bois, il y a Vincent qui embrasse les arbres et leur demande pardon pour ce que font les humains…
Devant la fenêtre de sa chambre d’hôpital, il y a Claudine qui compte les jours et les étoiles…
Sur la neige fraîchement tombée, il y a cet oiseau blessé que Sacha attrape délicatement dans ses petites mains, et couvre de baisers…
Devant chez moi, il y a Nouria qui attend le bus et qui le rate, parce qu’elle récite ses tables de multiplications les yeux fermés...
Sur le chemin, il y a Enzo le super-héros, qui marche fièrement avec sa cape dorée et s'avance pour combattre les méchants…
Dans un bureau de la sécurité sociale, il y a Emilie qui adore ces jours où elle colle des timbres pour aider sa maman sur son lieu de travail…
Sur le lac, dans un petit canot gonflable, il y a Tristan qui dérive et s’inquiète, en regardant la nuit tomber. Ses rames ont coulé et sa maman va le gronder. Elle lui avait pourtant bien dit de ne pas s’éloigner…
Dans la tête de William, il y a son cœur, parce que le cœur est toujours un peu dans la tête ! Jamais dans les pieds, mais parfois dans les chaussettes...
Sous la jupe de sa maman, il y a Leila qui se cache des bruits et de la foule de la ville...
Dans la salle de classe, il y a Tony qui regarde le tableau et voit un immense trou noir…
Sur le port, il y a Gwenolé qui hurle sur la criée « qu’il est bon mon poisson pané » …
Dans les champs, il y a Abder, avec son père, sa mère et sa sœur, qui essaient de trouer de leurs mains fatiguées, la terre craquelée où seule l’herbe pousse, pour y semer des graines qui les nourriraient…
Dans le village des Adrets il y a Clémence qui met ce soir une très belle robe de soirée pyjama pour aller dormir chez sa copine Nina...
Sur le tracteur de la ferme, il y a Sébastien qui veut faire comme son père et devenir agriculteur…
Dans l’avion, il y a Lou qui rejoint pour six mois son papa à l’autre bout du monde...
Dans l’herbe du terrain de foot, il y a Marie, allongée sur le dos et les bras en croix, qui vient de marquer le plus beau but de sa vie et s’imagine déjà une grande joueuse de football…
Dans son livre, il y a Paul qui préfère les histoires de dragon aux histoires des adultes toujours trop compliquées…
Il y a aussi Karine, Ahmed, Jean, Pierre, Yang... et tous les autres, il y a toi, et toi, il y a nous, certains devenus grands. Que ce premier juin des écritures théâtrales jeunesse soit l'occasion de nous retrouver tous pour fêter les mots de l'enfance, redécouvrir ses rêves grandioses et célébrer les sortilèges du théâtre…
Ouvrons ici à XXX, ce 1er juin qui partout en France et ailleurs nous rassemble ! "
Illustrations : Vincent Debats.